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Title: La Bibliothèque Canadienne, Tome IX, Numero 2, Juillet 1829.

Date of first publication: 1829

Author: Michel Bibaud (1782-1857)

Date first posted: Dec. 22, 2021

Date last updated: Dec. 22, 2021

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La Bibliothèque Canadienne


Tome IX. 15 JUILLET, 1829. Numero II.

HISTOIRE DU CANADA.

Continuation.

Après la cession de l’Acadie et de la côte mérédionale de Terre-Neuve à l’Angleterre, il ne restait plus guère aux Français que l’Ile Royale ou du Cap Breton, pour faire la pêche de la morue, ou du moins pour faire sécher ce poisson. Dès 1706, MM. Raudot avaient envoyé à la cour de France un mémoire où ils recommandaient fortement la colonisation de cette île, comme devant être du plus grand avantage à la France et au Canada; particulièrement sous le rapport du commerce. On parut faire d’abord assez peu d’attention à ce mémoire, quelque bien pensé qu’il fût; mais après la perte de l’Acadie et de Plaisance, on demeura convaincu de la nécessité, non seulement de peupler le Cap Breton, mais encore de le fortifier. Après avoir délibéré pendant quelque temps sur le choix du lieu où il convenait de former le principal établissement, et hésité entre le port de Ste. Anne et le Havre à l’Anglais, on se décida enfin pour ce dernier, et l’on commença à y bâtir une ville, à laquelle on donna le nom de Louisbourg. M. de Costebelle, qui avait perdu le gouvernement de Plaisance, fut chargé de celui de la nouvelle colonie.

On avait compté d’abord de transporter dans l’Ile Royale tous les Français établis en Acadie: on y avait même invité tous les sauvages compris sous le nom d’Abénaquis, et quelques tins de ces derniers y formèrent, en effet, une bourgade; mais les Acadiens n’y trouvant pas de quoi se dédommager de ce qu’ils possédaient dans leur pays, ne voulurent pas consentir à la transmigration, comptant sur tes promesses que leur firent les gouverneurs anglais de les bien traiter à l’avenir. Les habitans de Plaisance, au contraire, passèrent tous à Louisbourg, et s’y trouvèrent bientôt beaucoup plus à leur aise qu’ils n’avaient jamais été en Terre-Neuve.

Pendant qu’on se donnait ces mouvemens au sujet de l’Ile Royale, le marquis de Vaudreuil, de concert avec M. Begon, successeur de M. Raudot, dans l’intendance du Canada, s’occupait du soin de fortifier et de peupler cette colonie, où le nombre des habitans semblait diminuer, au lien d’augmenter. “Le Canada, dit-il dans une lettre qu’il écrivit à M. de Pontchartrain, en 1714, n’a actuellement que quatre mille quatre cent quatre-vingt-quatre habitans en état de porter les armes, depuis l’âge de quatorze ans jusqu’à soixante, et les vingt-huit compagnies des troupes de la marine, que le roi y entretient, ne font en tout que six cent vingt-huit hommes. Les colonies anglaises ont soixante mille hommes en état de porter les armes, et on ne peut douter, qu’à la première rupture, ils ne fassent un grand effort pour s’emparer du Canada.”

M. de Vaudreuil ne pensait pas qu’il fût difficile d’augmenter les forces qu’il y avait en Canada, après la grande réforme qui venait de se faire en France. Quant à l’augmentation du nombre des habitans, il proposait à son gouvernement d’envoyer tous les ans dans la colonie cent cinquante hommes, pris parmi les faux sauniers condamnés aux galères, pour être distribues chez les cultivateurs comme engagés, moyennant un modique salaire; et cela pendant trois ans, au bout desquels ils seraient libres, sans néanmoins pouvoir retourner en France. Il espérait que par ce moyen il se ferait insensiblement une augmentation d’hommes acoutumés au travail, et capables de porter les armes, en cas de besoin.

Cependant les Outagamis, plus irrités qu’affaiblis par la grande perte qu’ils avaient essuyée au Détroit en 1712, infestaient de leurs brigandages, non seulement les environs de la Baie, leur pays naturel, mais presque toutes les routes qui faisaient la communication des postes éloignés de la colonie, et celles qui conduisaient du Canada à la Louisiane, où, depuis quelques années, les Français avaient construit des forts et formé des établissemens, d’abord sous la conduite du chevalier d’Iberville, et ensuite sous celle de M. Crozat. A l’exception des Scioux, qui souvent se joignaient à eux, et des Iroquois, avec qui ils avaient fait alliance, mais qui ne paraissaient pas leur prêter la main, du moins ouvertement, toutes les tribus qui commerçaient avec les Français souffraient beaucoup de ces hostilités. Craignant qu’elles ne s’en trouvassent fatiguées au point de s’accommoder avec ces barbares, M. de Vaudreuil leur fit proposer de se réunir à lui pour les exterminer. Elles y consentirent toutes, et ce général leva un parti de Français dont il confia le commandement à M. de Louvigny. Cet officier fut joint sur la route par un grand nombre de sauvages, et il se trouva bientôt à la tête de huit cents hommes, résolus de ne point poser les armes tant qu’il resterait un Outagami à combatre.

Plus de cinq cents guerriers et trois mille femmes et enfans, de cette tribu, s’étaient enfermés dans une espèce de fort entourré d’un bon fossé et de trois rangs de palissades en dedans. Trois cents hommes étaient en marche pour les venir renforcer; mais ils n’arrivèrent pas à temps. M. de Louvigny les attaqua dans les formes. Il ouvrit la tranchés à trente toises du retranchement, avec deux pièces de campagne et un mortier à grenades, et dès le troisième jour, il n’en était plus éloigné que de douze, quoique les assiégés fissent un très grand feu. Il se disposa ensuite à faire jouer des mines sous leurs courtines, mais dès qu’ils s’en apperçurent ils demandèrent à capituler, et proposèrent des conditions qui furent rejettées. Ils en proposèrent ensuite d’autres, que le commandant communiqua aux sauvages. Elles portaient 1º. Que les Outagamis feraient la paix avec les Français et leurs alliés; 2º. Qu’ils rendraient tous les prisonniers qu’ils avaient faits; 3º. Qu’ils remplaceraient les morts par les esclaves qu’ils feraient sur les tribus éloignées avec lesquelles ils étaient en guerre; 4º. Qu’ils paieraient les frais de la guerre du produit de leur chasse.

Quoique ces conditions ne parussent pas plaire à tous ses alliés, M. de Louvigny crut devoir les accepter. Il exigea des Outagamis six otages, tous chefs, ou fils de chefs, pour sûreté de l’exécution du traité, qu’ils lui remirent par écrit, avec la promesse verbale d’envoyer des députés à Montréal, pour le ratifier avec le gouverneur général. M. de Vaudreuil approuva tout ce qu’avait fait M. de Louvigny; mais malheureusement la petite vérole enleva, durant l’hiver, à Montréal, trois des otages qu’il lui avait amenés, et entr’autres le fameux chef Pémoussa. La crainte qu’il eut que ce contretemps ne mit obstacle à l’exécution du traité, lui fit juger à propos de renvoyer Louvigny à Michillimakinac, tant pour obliger les Outagamis à envoyer leurs chefs à Montréal, que pour ramener les coureurs de bois dans la colonie. Cet officier ne put partir qu’à la fin de Mai 1817. Les Outagamis lui firent des promisses qu’ils n’exécutèrent point; mais son voyage ne fut pas tout-à-fait inutile; car il ramena presque tous les déserteurs, et engagea un grand nombre de sauvages à porter leurs pelleteries à Montréal.

Cette même année 1817, sur les représentations du gouverneur général, il fut émané un édit ou déclaration royale pour régler l’office de notaire. La négligence des notaires à tenir leurs papiers en ordre formait depuis longtemps des sujets de plainte dans la colonie: par la déclaration de cette année, il était ordonné que les minutes des notaires fussent tous les ans rassemblées et liées en paquets; que le procureur-général ou les trésoriers seigneuriaux fissent annuellement une visite dans leurs études, et dressassent des procès verbaux de l’état où ils les auraient trouvées; que les juges enrégîtrassent les papiers des notaires défunts, à l’instance du procureur-général ou des trésoriers seigneuriaux, et les fissent transporter au greffe de la juridiction; enfin que le greffier serait tenu de donner aux héritiers des notaires défunts une copie du régître ou rôle de leurs minutes, et la moitié des émolumens provenant des copies qui en seraient tirées, pendant cinq ans. Il est peut-être à regretter qu’une partie au moins de ces règlemens soit tombée en désuétude, ainsi que d’autres, qui furent faits subséquemment, et qui ne paraissent pas être mis à exécution.

L’année suivante, 1818, le P. Lafitau, jésuite, découvrit dans les forêts du Canada, le ginseng, plante qu’on avait cru appartenir exclusivement à la Corée et à la Tartarie chinoise. Ce fut une source temporaire de richesses pour ce pays. Le ginseng était très estimé à la Chine, et s’y vendait très cher: il devint en Canada un article d’exportation, et il se vendit à Québec jusqu’à vingt-cinq francs la livre. Malheureusement, ce haut prix excita la cupidité, et l’on perdit tout pour vouloir gagner trop, ou trop promptement: au lieu d’attendre que la racine fût parvenue à sa grosseur et à sa maturité, c’est-à-dire au mois de Septembre, on la recueillit au mois de Mai: on employa les sauvages pour parcourir les bois et arracher la plante partout où elle pouvait se trouver; et à la faute de la cueillir trop tôt on ajouta celle de la faire sécher trop promptement, dans des fours. La détérioration du ginseng du Canada en fit diminuer le prix à la Chine, et il devint à la fin si rare qu’il cessa presque entièrement d’être un article de commerce.

Jusqu’au temps dont nous parlons, les Français n’avaient fait nulle attention à l’île St. Jean, quoiqu’elle fût voisine de l’Acadie et on ne peut mieux située pour la pêche de la morue; mais en 1719, il se forma en France une compagnie pour peupler cette île, ou du moins y faire un établissement. Le comte de St. Pierre, premier écuyer de la duchesse d’Orléans, se mit à la tête de l’entreprise, et le roi, par ses lettres patentes datées du mois d’Août de cette même année, lui concéda les îles de St. Jean et de Miscou, en franc-aleu noble, sans justice, que sa majesté se réservait, à la charge de porter foi et hommage au château de Louisbourg, dont il devait relever sans redevance.

Au mois de Janvier de l’année suivante, le comte de St. Pierre obtint de nouvelles patentes de concessions aux mêmes titres et conditions, pour les îles de la Madeleine, Botou, ou Ramées, îles et îlots adjacents, tant pour la culture des terres, exploitation des bois, que pour les pêches des morues, loups-marins et vaches marines.

(A Continuer.)

PETIT SYSTEME D’AGRICULTURE.

Chapitre second.

De l’Humidité, premier principe de la végétation, et des moyens de
la fixer et conserver.

L’humidité est le grand principe de la végétation; c’est à ses nombreux bienfaits que l’on doit la beauté et la majesté de nos vastes forets; la richesse et l’abondance de nos précieuses moissons, et l’agrément de nos vertes prairies. L’humidité jointe à l’activité du soleil, est le premier moyen dont la nature se sert, pour faire germer et croître les grains que nous confions à la terre. Sans l’humidité la nature ne serait qu’un vaste champ de misère et de stérilité, et le spectacle qu’elle nous présenterait, ne serait qu’un spectacle de langueur et de faiblesse. Son agréable aspect, au lieu de nous réjouir par la variété de sa verdure et de ses couleurs, nous attristerait par une apparence sombre et lugubre de défaillance et de mort; tout nous annoncerait le dépérissement et la ruine de nos riantes campagnes. En effet, qu’il est pénible de voir une terre privée de ce bienfait restaurateur de la végétation; un sol âpre et inculte, des arbres languissants, une herbe mourante, des animaux affamés et altérés, des oiseaux tristes et plaintifs, des reptiles égarés, expirants, et des insectes faibles, fuyant ces tristes et misérables lieux, où tout annonce la stérilité, la misère et la mort: le cultivateur n’ose s’y fixer, et le voyageur ne jette que des regards de pitié et compassion sur ces stériles contrées.

L’humidité étant donc le grand principe de la végétation, le cultivateur sensé, doit premièrement s’appliquer à en connaître les causes naturelles, avant que de se servir de moyens factices pour la fixer et la conserver.

Dès qu’un terrain est couvert de mousses épaisses, et autres herbes et petits végétaux de cette espèce, l’humidité s’y arrête bien facilement: car les plantes se pourrissent, et forment une espèce de terreau, qu’on appelle couche végétale, qui devient très fertile, et propre à donner naissance à de plus grands végétaux. Chaque classe ou espèce de végétaux demande un certain degré d’humidité qui lui est propice et convenable, et sans le secours duquel elle ne pourrait exister, ou au moins croître à la grandeur de sa propre espèce. Dès que l’humidité manque, la végétation devient languissante et dégénère promptement.

Les grandes sécheresses en sont une preuve évidente. Les grands arbres demandent beaucoup d’humidité. Les forêts ne pourraient exister sans cette généreuse bienfaitrice; aussi elles contiennent toujours un sol humide et fangeux. Elles sont elles-mêmes les indispensables conservatrices de leur existence. Elles empêchent par leur épaisseur le soleil de parvenir à leur sol et de le dessécher par ses vives ardeurs: elles empêchent aussi par leur épaisseur les émanations humides de la terre de s’exhaller en vapeurs dans les airs. C’est une grande prévoyance dans un cultivateur, de ne point priver sa terre entièrement de tous les arbres; il est très à propos, au contraire, d’en laisser épars ça et là, afin d’y fixer et retenir l’humidité, et de servir de couverture et d’abri aux bestiaux.

Au reste, il faut comparer les vallées et les plaines, ou une terre en culture, lorsqu’elles sont entourrées de hauteurs garnies d’arbres, à de vastes bassins, dans lesquels l’air reste toujours plus calme, sans former de courrans, et se charge des émanations humides de la terre, et par conséquent plus convenables aux végétaux; au contraire, si on abat les arbres qui servent de bords et de paravents aux terres, l’air qui les couvre reçoit le mouvement des couches d’air supérieur; il devient lui-même un courrant rapide, qui enlève les émanations de la terre, la dessèche, et fait un grand dommage à la végétation. Donc il est très prudent de laisser sur une terre une certaine quantité de grands arbres, qui sans être trop forts et trop touffus pour pouvoir nuire a la végétation, le soient assez pour conserver et retenir l’humidité qui lui est nécessaire et convenable. Les lieux hauts et élevés, privés du secours des grands arbres, et exposés aux vents et aux vives ardeurs du soleil, et dont le sol est ordinairement de qualité médiocre, ne sont presque toujours couverts que d’arbustes épars ça et là, et d’herbes sèches, auxquelles le soleil enlève la plus grande partie de leur substance par la force de son insatiable attraction.

L’expérience démontre que dès qu’une plante manque du degré d’humidité convenable, et nécessaire à son espèce, elle languit et dégénéré promptement, et ne produit que des fruits maigres et désagréables; mais aussi, il est évident qu’un plus grand degré d’humidité lui est préjudiciable et nuisible: rien de si clair et de si certain. Il en est ainsi des grains que nous confions à la terre; chaque espèce demande son humidité convenable. Les bleds sont ceux auxquels un plus grand degré d’humidité est plus nécessaire: les couches végétales et argilleuses leurs sont des plus favorables, parce qu’elles contiennent beaucoup d’humidité, et un suc nourricier fort abondant. Il en est de même des autres espèces de grains: chacune doit être confiée au terrain qui lui est avantageux. Si on en met quelques unes dans une terre trop riche, la paille devient grande et furieuse, et le grain ne correspond jamais à la superbe apparence de sa belle et forte tige. Il est donc à propos de savoir distinguer le degré d’humidité convenable à chaque espèce de grains. Le cultivateur intelligent sait et connaît parfaitement que le bled demande le premier degré d’humidité et la meilleure ferre; l’orge aussi exigeante, requiert, pour ainsi dire, la même qualité dans le sol: les pois exigent aussi un bon terrain; ensuite le seigle, les aveines, et enfin les bleds sarrazins, qui demandent un terrain léger, sec et sablonneux. Mais tout ceci ne doit s’entendre, qu’autant que la terre où il y a nu plus grand degré d’humidité, contient un suc nourricier ou vertu nutritive propre à la substance de chaque espèce de grains. Car outre l’humidité, cause primitive de la végétation, la terre contient encore un suc nutritif propre à la substance de chaque espèce de grains, lequel est la cause secondaire de la végétation, et qui ne lui est pas moins nécessaire; de sorte que cette vertu nutritive doit être jointe à l’humidité. C’est de quoi il sera traité dans le chapitre suivant.

Si le bled est semé fort, les années pluvieuses lui sont préjudiciables; car l’humidité, qui devient trop abondante, ne peut s’évaporer dans l’air, parce que la force du bled empêche le soleil de parvenir au sol; alors le bled rouille et devient sujet à d’autres accidens et maladies. Mais lorsque le bled est semé fort, les années de sécheresse lui sont favorables, car par sa force, il ne retient que l’humidité qui lui est avantageuse et nécessaire.

On doit toujours semer le bled, ou autres espèces de grains bien fort dans les terres sablonneuses élevées ou exposées aux vives et brûlantes ardeurs du soleil d’été. C’est le moyen qu’il conserve son humidité convenable. De même on peut et doit le semer plus clair dans les terres fortes et pleines d’humidité: car outre l’humidité que la terre contient, le bled talle et pousse avec plus de force et de vigueur.

C’est donc à l’humidité, comme premier principe de la végétation, que nous devons les produits et revenus de nos terres. C’est à cette cause primaire que nous devons nos jouissances et nos satisfactions journalières.

L’expérience nous démontre, que toute espèce de terre, les sables mêmes, peuvent servir de berceau aux plus grands arbres, et qu’il suffit pour les y élever de les couvrir de paille ou de gazon, pour les défendre de la trop vive action du soleil, qui ça et là l’humidité et le suc dont la plante se nourrit. Le fait suivant, que j’ai extrait de quelques observations sur Newton, mérite qu’on le rapporte à l’appui de ce que j’avance. Un naturaliste remplit une boëte de terre, et y serra un gland, après avoir pesé la terre, qu’il avait fait sécher autour: il pesa de même l’eau des arrosemens: le gland germa, le chêne crût considérablement, et au bout de quelques années, il arracha le chêne, et fit sécher la terre de nouveau, et la pesa: elle n’avait rien perdu de sa pesanteur. Il pesa aussi le chêne, qui se trouva peser plus que la terre où il l’avait semé; d’où il conclut que l’eau seule avait nourri cet arbre, et s’était convertie en sa substance.

D’autres expériences très nombreuses prouvent que l’eau est la première et principale substance des arbres et des grains. Il est donc prudent de ne point négliger les moyens naturels de conserver l’humidité. Les terres qui sont exposées à être couvertes d’eau, sont presque toujours fertiles et très profitables.

Il n’est pas nécessaire d’employer aucun moyen factice pour y fixer et conserver l’humidité; Ne voyons-nous pas les prairies qui sont sur des îles basses, ou sur les bords des fleuves et des rivières; et qui sont baignées par les eaux du printems, n’avoir jamais besoin d’engrais, et toujours produire des foins très abondants, et d’une bonne qualité, tandis que celles qui sont sut les terres hautes, ne poussent et ne produisent que par le moyen des engrais, et dégénèrent bientôt, si l’on cesse de leur donner les moyens de fixer et conserver l’humidité.

L’Egypte est le pays le plus fertile de l’univers; les débordemens du Nil en sont la principale cause: les eaux laissent sur la terre un dépôt ou gluten, qui a tout à la fois la vertu d’engraisser le sol, et d’y conserver l’humidité. La Lybie, au contraire, est stérile, et ne produit aucun froment, parce que son sol est sableux et privé des rafraichissements de la pluie et du voisinage des fleuves et des rivières; &c. D’où l’on doit conclure, que l’eau est le premier et principal moyen dont la nature se sert pour faire germer et croître les grains que nous confions à la terre, en y joignant l’action du soleil, et le suc natritif; causes secondaires de la végétation.

LA MOUCHE HESSOISE.

La crainte de trop allonger mon morceau, dans le dernier numéro de la Bibliothèque Canadienne, m’a empêché d’exprimer l’idée que j’avais, qu’il pourrait être bon de ne pas employer pour semence du bled recuilli dans un champ où la mouche hessoise se serait montrée, l’année précédente; et cela, de peur que par hazard, ses œufs ne fussent déposés, d’une manière ou d’une autre, sur le chaume ou sur l’épi, et qu’il n’en restât parmi le grain, même après les opérations du battage et du vannage. Que ces œufs soient déposés par la puce, ou le ver, devenu mouche, ou insecte ailé, sur le grain même, malgré ses enveloppes, comme le prétend un correspondant du Canadian Courant, c’est ce qui ne me paraît guère possible, et ce que j’ai conséquemment beaucoup de peine à croire: néanmoins, comme l’écrivain se dit appuyé par l’expérience pour affirmer que les œufs de la mouche hessoise sont réellement détruits par l’opération du chaulage, il serait peut-être utile de répéter l’épreuve dont il parle, pour s’assurer de la vérité ou de la fausseté de son avancé, et recourir au procédé, lorsqu’il y aurait nécessité, s’il était reconnu pour efficace.

M. D.

Voici le morceau du Canadian Courant, tel que traduit pour la Minerve.

Méthode simple pour détruire la Mouche Hessoise, ou Puce
des Bleds.

Comme les semis de bleds ont cette année en plusieurs endroits souffert beaucoup de dégat du travail destructeur de cet insectes, nous nous tenons heureux qu’un correspondant estimable et obligeant nous mette à même de publier les directions suivantes pour leur destruction.

La mouche hessoise dépose ses œufs sur l’épi du bled avant la moisson: ces œufs sont si petits qu’ils sont imperceptibles à la vue naturelle, mais on peut les voir bien distinctement à l’aide du microscope; on verra quelquefois plusieurs de ces œufs sur un même grain de bled. Ils s’y attachent au moyen d’une substance glutineuse dont les entoure l’insecte ailé qui les dépose, et ils y tiennent si fortement, qu’il est difficile de les en détacher par les diverses opérations de la cueille et du battage. Peu de tems après que le bled de semence commence à germer dans la terre, la chaleur vivifiante du printems fait éclore l’embryon de l’insecte sous la forme d’une très petite larve, comme chez toutes les espèces de cette classe: ces petites larves se placent à la racine des tiges provenant du grain où les œufs étaient attachés, entre le style et les feuilles d’en bas, où on peut les voir en repos dans le mois de mai et au commencement de juin: elles y restent jusqu’à ce que la chaleur de la saison les conduise à maturité, et elles commencent alors à se nourrir de la substance qui les environne. Ce n’est qu’à cette époque que leurs effets pernicieux commencent à être visibles, les bleds se desséchant et coulant. Ceci explique pourquoi lès bleds attaqués de ces insectes destructeurs présentent une vigoureuse apparence jusqu’au mois de Juin, auquel tems l’embryon commence à manger.

Maintenant il reste évident que si on pouvait détruire les œufs sur le grain de semence, par des procédés qui n’en endommageassent pas les qualités végétatives, on parerait à ce mal ruineux. On y parviendra par un procédé très simple, que voici:—“Trempez le bled de semence dans l’eau pendant douze-heures; étendez-le sur le pavé de la batterie, de manière à faire échapper l’eau surabondante: ensuite prenez de la chaux fraichement éteinte, et mêlez-la au bled en quantité suffisante pour que tous les grains en soient couverts, ayant soin de bien remuer le grain avec une pelle, de manière à ce qu’aucune partie n’échappe au contact immédiat de la chaux, qui ainsi appliquée détruira promptement les œufs, et par conséquent préservera les grains de la destruction.”

Notre, correspondant nous assure que l’œuf qui paraît clair et transparent avant l’application de la chaux, devient ensuite opaque et couvi. Diverses expériences ont prouvé l’efficacité de ce remède; nous en rapporterons une. On prit du bled qu’on supposait attaqué des puces; on opéra sur la moitié avec de la chaux, et on sema aussi l’autre moitié sur le même terrain, par planches alternatives; le résultat fut que le grain qui avait subi le chaulage vint à maturité et rapporta beaucoup, pendant que les planches où on avait semé le bled sans préparation furent presque totalement détruites.

Le mal est si sérieux qu’on ne peut répandre trop le remède ci-dessus; nous en recommandons la traduction dans les papiers français, et nous pensons que les curés de campagne feraient bien envers leurs paroissiens en le faisant lire après les offices à la porte des églises.

LES PRETENDUS INFLUENCES DE LA LUNE.

Un simple calendrier, qui ne pouvait faire aucun mal, et dont le pouvoir était d’indiquer les temps des assemblées, fut converti, (chez les Egyptiens,) en une source d’influence qui s’étendit à tout, et dont une infinité de gens ne veulent pas, encore aujourd’hui, qu’on les détrompe. A les entendre, c’est la lune qui règle la crue des cheveux, la plénitude des huitres et l’effet des remèdes. Voient-ils le plomb blanchir, les pierres s’écailler, et les clochers ou pyramides s’incliner sensiblement vers le sud-ouest, il leur serait aisé d’en trouver la raison dans l’alternative perpétuelle du chaud, des vents, et des grandes pluies qui viennent de ce côté, où elles nourrissent des mousses capables d’écailler les pierres par les efforts de leurs racines, et où elles minent peu à peu les mortoises et les tenons des charpentes. Mais les esprits prévenus s’accommodent bien mieux de l’ancien langage. Avec la lune ils rendent raison de tout. Sans raisonner ni rien concevoir, ils expliquent tout, et quoiqu’on leur montre que la lumière de cette planète, rassemblée au foyer d’un miroir ardent, ne peut pas faire monter d’un point la liqueur du thermomètre, ils vous soutiendont qu’elle a la vertu de calcine, la plomb, de miner le bois et de ronger les pierres mêmes.

Pluche, Histoire du Ciel.

OPINIONS SINGULIERES D’UN PHILOSOPHE
CHRETIEN.

Si nous goûtons un plaisir extrême à voir rassemblées dans un même lieu les principales productions de la nature, quel n’est pas le ravissement des esprits, lorsqu’ils parcourent les mondes que Dieu a semés dans l’étendue, et qu’ils contemplent l’immensité de ses œuvres!

O! la délicieuse occupation que celle de ces intelligences supérieures, quand elles comparent les différentes économies de tous ces mondes, et qu’elles pèsent, à la balance de la raison, chacun de ces globes!

Mais toutes les intelligences célestes ne jouissent pas, sans doute, de ces avantages au même degré. Il en est peut-être à qui il n’a été donné que de connaître un seul monde; d’autres en connaissent plusieurs; d’autres en embrassent une plus grande suite.

Habitans de la terre, qui avez une raison capable dé vous persuader de l’existence de ces mondes, n’y porterez-vous jamais vos pas? L’Etre infiniment bon qui vous les montre de loin, vous en refuserait-il à jamais l’entrée? Non, appelés à prendre place, un jour, parmi les hiérarchies célestes, vous volerez, comme elles, de planètes en planètes; vous irez éternellement de perfection en perfection, et chaque instant de votre durée sera marqué par l’acquisition de nouvelles connaissances. Tout ce qui été refusé à votre perfection terrestre, tous l’obtiendrez sous cette économie de gloire.

L’homme est semé corruptible, il ressuscitera incorruptible et glorieux: ce sont les termes de l’apôtre philosophe: l’enveloppe du grain périt; le germe subsiste, et assure à l’homme l’immortalité. L’homme n’est point en soi ce qu’il nous paraît être: ce que nous en découvrons ici bas n’est que l’enveloppe grossière sous laquelle il rampe, et qu’il doit rejeter. Un corps organisé, formé d’élémens analogues à ceux de la lumière, n’exige sans doute aucune réparation. Le corps spirituel se conservera donc par la seule énergie de sa mécanique. Et si la lumière ou l’éther ne pèse point, l’homme glorifié se transportera, au gré de sa volonté, dans tous les points de l’espace, et volera de planètes en planètes, de tourbillons en tourbillons, avec la rapidité de l’éclair. Enrichi de facultés spirituelles et corporelles qui le rendront propre à habiter également différents mondes, il pourra en contempler les diverses productions, et meubler son cerveau de toutes les connaissances qui ornent celui des habitans du ciel.

Bonnet, Contemplation de la Nature.

LA MONTAGNE BRULANTE.

Parmi let phénomènes que la nature enfante, une montagne, qui n’a aucun rapport avec les volcans, et qui recèle cependant un feu intérieur, n’est pas un des moins remarquables. Cette montagne, à laquelle on a donné le nom de Montagne brûlante, se trouve dans le département de la Sarre, sur la droite de la route de Sarrebruck à Artweiller, entre Duttwiler et Saint-Imbert. La fumée qui s’en exhale, la chaleur qu’on y ressent, les traces de souffre, d’alun et de vitriol qu’on y appercoit, le bruit sourd qui s’y fait entendre, le dépérissement total des végétaux dans cette contrée, tout y annonce un incendie souterrain. Quelle en est la cause! Il sera facile de l’expliquer, lorsqu’on saura que cette montagne est remplie de houille, et que le hazard, ou une combustion naturelle peut l’avoir embrasée. Le fait est que ce feu dure depuis plus d’un siècle, et que fort heureusement il ne s’est point encore communiqué aux mines de charbon de terre qu’on exploite dans la montagne même. Des minéralogistes tirent de la Montagne brûlante une très grande variété de pierres, plus ou moins vitrifiées, dont les nuances offrent le plus agréable coup d’œil.—(Merveilles du Monde.)

EFFETS DES COULEURS SUR LES ANIMAUX.

M. Forbes dit dans ses intéressants mémoires sur l’Orient, que lorsqu’il était à Dazagon dans la Concan, qui alors appartenait aux Marattes, il eut pendant plusieurs semaines un caméléon, sur lequel il observa attentivement le changement de couleurs. Il était ordinairement d’un beau fond vert parsemé de taches d’un bleu pâle. Cette couleur se changeait ordinairement en jaune brillant, en olive ou vert foncé. Mais lorsqu’il était irrité, ou qu’un chien s’approchait de lui, dans lequel cas la peur était sans doute la cause efficiente, son corps s’enflait considérablement, et sa peau se couvrait, comme l’écaillé de la tortue, de taches nuancées de jaune, d’orangé, de vert et de noir, et c’est alors qu’il paraissait avec plus d’avantage. Tout ce qui était noir affectait singulièrement l’animal; la plinthe de la chambre était de cette couleur, et il l’évitait soigneusement; mais si par hazard il s’en approchait, il tombait en syncope, et devenait aussi noir que le jais. Il était évident par le soin qu’il prenait d’éviter ces objets, et par le changement qu’ils opéraient en lui, qu’ils lui étaient désagréables. Lu couleur noire paraissait avoir sur lui l’effet d’un poison.

Le fait, (dit le Quarterly Review), est très curieux, et mérite d’être examiné plus à fond. Nous savons peu de chose de la manière dont les animaux sont affectés par les couleurs, et nous ne l’avons pas appris par des ouvrages scientifiques. L’écarlate mot le buffle et le taureau en fureur, et a sur eux, selon l’idée qu’en a un aveugle, l’effet d’une trompette. C’est parce que la vipère a la même antipathie, que ceux qui veulent prendre de ces reptiles leur présentent un sac rouge, pour les engager à le mordre et leur arracher leur dards. L’asphodèle, ou toute autre fleur d’un jaune brillant, fera tomber le perchoir dans le filet. Celui qui portera un chapeau noir durant l’été, aura autour de lui dix fois plus de mouches que son compagnon qui portera un chapeau blanc. Quand un plus grand nombre d’observations de cette sorte auront été faites et classées méthodiquement, elles pourront conduire à des conséquences d’utilité pratique. On a observé que la couleur noire attire et retient les odeurs plus que toutes les autres. Ne serait-il pas possible qu’elle contractât et communiquât plus aisément l’infection?

VOLCAN NOUVELLEMENT DECOUVERT.

Il a été découvert un volcan dernièrement, dans la direction de la rivière Hunter, dans cette partie de la Notasie que les Anglais appellent New-South-Wales. Il était en activité lors de sa découverte, vomissant, de jour, un épais volume de flamme mêlée de fumée, et de nuit, une colonne de flamme sulphureuse dé couleur bleuâtre. La bouche du volcan est située entre les sommets de deux montagnes auxquelles les indigènes ont donné le nom de Wingen. Il n’y a aucune aparence de lave le long de la base non plus que sur le penchant des montagnes entre lesquelles le volcan se trouve placé. Le cratère a, dit-on, vingt-deux pieds de largeur sur trente de longueur. Tout concourt à faire voir que ce phénomène n’existe pas depuis très longtemps. On dit que les indigènes ne regardent ce volcan qu’avec l’expression de l’étonnement et de la crainte; comme si son existence leur était absolument étrangère. Ils l’appellent, en leur langue, Dibil. Il paraît qu’il n’y a pas encore eu d’éruption, et que le cratère s’étend journellement en longueur et en largeur.

LE FAUX CURTIUS.

Le brick danois Anna, capitaine Holl, se trouvait à Bahia (Brésil), au mois d’octobre dernier. Le 20 du même mois, il se disposait à quitter ce port pour Pernambuco, afin d’y compléter son chargement, et retourner ensuite en Europe. Vers midi, le capitaine Holl reçut à bord la visite d’une homme enveloppé d’un manteau à demi usé, qui demanda la faveur d’un entretien particulier. Le capitaine fit éloigner son mousse, invita l’étranger à s’asseoir, et après plusieurs paroles insignifiantes, l’homme au manteau expliqua en ces termes le sujet de sa mission: “Je suis Florentin; je m’appelle Zernetti; depuis deux mois, je montre à Bahia un cabinet de figures en cire; mais je fais peu de chose dans cette ville. J’ai même contracté quelques dettes qu’il m’est impossible de payer en ce moment. Je voudrais aller à Pernambuco, où je suis certain de gagner beaucoup d’argent, et de pouvoir satisfaire, mes créanciers de Bahia. Ces Brésiliens sont impitoyables; j’aurais beau leur donner ma parole d’honneur de leur envoyer de Pernambuco le montant de leurs créances, ils ne me croiraient pas, et je suis informé que demain ils doivent faire saisir mon cabinet. Pour sortir d’embarras, j’ai résolu de partir secrètement; votre navire doit mettre à la voile demain avant le lever du soleil; je vous promets à mon arrivée à Pernambuco, de bien reconnaître le service que vous m’aurez rendu, si vous consentez à recevoir, à la nuit tombante, les cinq caisses de figures que j’aurai soin de tenir prêtes, et qu’il sera facile d’embarquer sans que la douane s’y oppose, attendu qu’un des gardiens du port est mon compatriote, et favorisera mon départ par tous les moyens propres à assurer le succès de ma fuite.”

Après quelques difficultés, dont l’adroit Florentin triompha sans peine, le capitaine danois consentit à recevoir le nouveau Curtius et son cabinet; les dispositions furent prises en conséquence, et le soir du même jour, le cabinet de figures et son propriétaire furent installée dans les emménagemens du brick. A neuf heures du matin, on leva l’ancre, et le navire fit voile avec bon vent pour sa destination. Pendant la première journée, il ne se passa rien de remarquable à bord. Le Florentin causait familièrement avec l’équipage, s’informant avec adresse de la valeur de la cargaison, et faisant de fréquentes descentes dans la cale pour s’assurer, disait-il, que ses caisses n’étaient point exposées à des avaries. Vers le soir, les allées et venues continuelles du Florentin excitèrent quelques soupçons, sans toute-fois qu’on y attachât trop d’importance. Qu’avait-on à redouter d’un individu seul et sans armes au milieu de dix marins forts et robustes? A minuit, lorsqu’une partie de l’équipage était livrée au sommeil, le quart entendit un grand remue-ménage dans la cale; il voulût prévenir le capitaine, qui était descendu dans sa chambre, mais il n’en eut pas le tems; il distingua même au milieu du tumulte la voix du capitaine qui appelait du secours. Avant qu’on ait eu le tems de se reconnaître, on vit sur le pont une douzaine d’hommes armés jusqu’aux dents qui frappaient d’estoc et de taille tous les marins qu’ils rencontraient.

En peu de tems ils furent en possession du navire; le capitaine, le second, deux matelots et le maître d’équipage avaient perdu la vie dans cette horrible mêlée; leurs corps furent jetés à la mer. Le mousse et un autre matelot, qui ne s’étaient point endormis, profitèrent du tumulte général; ils se jetèrent dans le canot et s’éloignèrent à force de rames du navire, sans provision, sans boussole et abandonnant au hasard le soin de leur destinée. La fortune ne leur fut point contraire; ils atteignirent la côte du Brésil, et firent au consulat de leur nation le rapport des évenemens dont ils avaient été les témoins. Des renseignemens postérieurs ont fait connaître que le soi-disant Florentin était un pirate, dont le navire avait été brisé sur la côte; qu’il avait échappé au naufrage avec une douzaine de ses complices, et que les prétendues caisses de figures en cire qu’il avait mises à bord du brick danois renfermaient ses compagnons, qu’il avait fait embarquer de nuit pour les soustraire à tous les regards.

(Le Navigateur.)

LES CHEMINS.

On sait combien la nature du terrain par où passe un chemin, contribue à le rendre bon ou mauvais, indépendamment de toute autre circonstance. Dans les terres jeunes et sablonneuses, par exemple, les chemins sont presque toujours beaux; au lieu que dans les terres fortes et glaiseuses, ils sont toujours mauvais, après une pluie abondante ou de duré, et mettent un temps considérable à se réparer. La diligence ou la négligence d’un cultivateur à faire les réparations nécessaires devant sa terre, met une différence presque aussi grande dans des chemins qui passent par le même terrain, ou pour mieux dire, dans le même chemin; et malheureusement le nombre des négligents l’emporte de beaucoup sur celui des diligents. C’est ce dont j’ai été témoin dans un petit voyage que j’ai fait dernièrement. Quoi-qu’il y eût déjà deux ou trois jours que la pluie avait cessé et que le beau temps continuait, j’ai trouvé presque partout, dans les terrés fortes, les chemins pleins d’ornières et de trous longs et profonds. Quelques exemples du contraire, c’est-à-dire des bouts dechemin réparés et devenus passablement beaux en conséquence, pouvaient faire voir clairement à quiconque voulait l’observer, que cette négligence du plus grand nombre des cultivateurs à réparer leurs chemins est impardonnable, particulièrement dans une saison de relâche, si je puis, comparativement parlant, m’exprimer ainsi.

C’est là un mal auquel il est, ce me semble, assez facile de remédier, et cela en tenant plus strictement la main à l’exécution des réglemens, ou plutôt des lois relatives aux chemins. Il est dans la plupart de nos routes publiques un autre mal, ou si l’on veut, un défaut qu’il serait plus difficile de corriger, et ce défaut consiste en ce qu’elles sont courbes, anguleuses, ou même tortueuses, dans bien des cas où elles auraient pu être en ligne droite sans inconvénient, ou du moins sans un inconvénient équivalent à celui qui résulte de leur état présent, et qui consiste en une perte de temps souvent très considérable, et parfois très dommageable. Passe encore que les routes soient tortueuses le long des grandes rivières, pour éviter l’inconvénient de couper les terres, &c.; mais encore conviendrait-il de s’en éloigner, si par là on évitait des montées et des descentes trop roides et trop fréquentes; car on sait que c’est à leur entrée dans les rivières que les ravines, les ruisseaux et les cours d’eaux sont les plus larges et les plus profonds. Si l’on ne s’en éloigne pas dans les endroits où ils sont très nombreux, comme le long de la rivière d’Yamaska, depuis un peu au-dessus du village de St. Hyacinthe jusqu’à celui de St. Césaire, et au-delà, l’on fait un chemin fatiguant par le grand nombre de côtes qu’il faut monter et descendre, et l’on se met de plus dans la nécessité de construire un grand nombre de ponts souvent très couteux, et toujours sujets à exiger de fréquentes réparations.

L’on ma dit que si, dans l’endroit dont je viens de parler, l’on avait fait passer le chemin à dix ou douze arpens seulement de la rivière, on aurait evité la plupart des côtes, ou plutôt des ravines profondes, qui se trouvent sur ses bords, et conséquemment épargné les fiais d’une cinquantaine de ponts, qu’il a fallu construire dans l’espace de cinq lieues. En quittant les bords de la rivière, ou plutôt en ne la suivant pas dans tous ses détours, on aurait travaillé sur un plan amélioré; mais on ne devait pas s’en tenir là; il aurait fallu encore s’en éloigner plus ou moins, selon le cas, pour rendre la route plus droite et conséquemment plus courte. Dans le plan indiqué pour les nouveaux chemins, on suivra la ligne droite, en évitant néanmoins d’un côté de profondes ravines, ou des marais impratiquables, et de l’autre, des collines élevées.

Ne serait-il pas aussi à propos qu’il y eût à toutes les fourches de chemins des écriteaux indiquant que celui-ci conduit à tel endroit, et celui-la à tel autre. Faute de cette précaution, le voyageur est très souvent obligé de s’arrêter sur la route, et quelquefois de revenir sur ses pas. Des pierres ou des poteaux indiquant le nombre de lieues ou de milles parcourus ou à parcourir, en allant d’un endroit à un autre, ont encore leur utilité. Il y a de ces deux sortes d’indices sur quelques unes de nos routes publiques; il devrait, suivant moi, y en avoir partout, et dans la langue de la grande majorité des habitans du pays. Ceux mêmes qui ne savent pas lire en tireraient cet avantage qu’ils leur donneraient une idée de plus de l’utilité de l’éducation.

Un Voyageur.

DERNIERES NOUVELLES.

Il a été reçu par le Corinthian, arrivé à New-York, des journaux de Londres jusqu’au 31 Mai.—Le 28 du même mois, Mr. Labouchere motionna qu’il fût mis devant la chambre des communes, des copies de la correspondance entre les ministres et les gouverneurs du Canada. Le résultat de la motion ne nous est pas connu; mais nous doutons qu’il se soit fait quelque chose par rapport à ce pays; car, suivant un journal du 29, “la session du parlement avançait rapidement vers sa cloture.”

Londres, le 30 Mai. Les journaux français de Jeudi contiennent des nouvelles de Constantinople jusqu’au 3, et de Jassy jusqu’au 9 de ce mois, par lesquelles on voit, d’un côté, qu’il y eu des combats opiniâtres sur les bords du Danube, où les Turcs out combattu avec une valeur et un enthousiasme extraordinaires, et, peut-on en inférer, avec un succès inattendu; et de l’autre, que les efforts des Russes pour bloquer strictement les Dardanelles n’ont pas réussi, et qu’il est arrivé à Constantinople un assez grand nombre de vaisseaux de différentes nations, pour faire renaître l’abondance dans cette capitale. On croyait à Constantinople que les Russes avaient essuyé coup sur coup plusieurs défaites dans l’Asie Mineure, et que le pachalic dont ils s’étaient rendus maîtres, dans la campagne précédente, leur avait été enlevé.

Le 31 Mai. Des lettres du théâtre de la guerre en Orient, disent qu’il paraît probable que les Russes feront une tentative désespérée contre le cœur de l’empire Ottoman. Elles mentionnent que les généraux russes sont déterminés à transférer le théâtre de la guerre aux portes de Constantinople, par le moyen d’une descente dans la Natolie. Elles ajoutent que la Porte faisait les plus grands efforts pour déconcerter ce plan, et entr’autres, qu’elle mettait tout en œuvre pour équipper une flotte capable de se musurer avec celle des Russes dans la Mer Noire. D’un autre coté, on disait que la flotte russe de l’Archipel devait coopérer à l’exécution du projet ci-dessus, en entrant de force dans la Mer Noire par les détroits des Dardanelles et de Gallipoli.

Outre Missolonghi, les Grecs assiégeaient encore Prevesa. D’après un journal de Florence du 7 Mai, ils étaient maîtres de la Livadie, des Thermophyles, de Salone, de Vonitza, et de presque tout l’espace entre Arta et Volos.

PETITE CHRONIQUE CANADIENNE.

Le député arpenteur général est, à ce que nous apprenons, revenu des Trois-Rivières, étant mécontent des arrangemens, et en conséquence de quelque mésintelligence survenue entre lut et l’officier qui était attaché au parti d’exploration, comme assistant, à l’égard du choix des voyageurs. Hier matin, (1er. Juillet,) le lieut. Tryall du 15e régt. attaché au parti en qualité de naturaliste, et l’enseigne Nixon comme assistant, sont partis de la Pointe à la Hache, près des forges, pour monter la rivière St. Maurice jusqu’à Montichang. Le parti est maintenant composé des deux derniers messieurs et de 6 hommes, avec trois canots de 3 à 3½ brasses. Gazette de Québec.

Nous apprenons que les journaux tenus par les différents messieurs attachés aux expéditions par le St. Maurice et le Saguenay, jusqu’au lac St. Jean, entreprise l’été dernier, en vertu d’une loi provinciale, ont été mis entre les mains d’un éditeur en cette ville, qui se prépare à les digérer en un ouvrage destiné à être publié à Londres. L’ouvrage sera accompagné de cartes, &c. et d’un nombre de points de vues qu’on a rencontrés. Ibid.

M. Phelps, le contracteur du Canal de Welland, (H. C.) donne avis qu’il a besoin d’un nombre de journaliers pour travailler au canal. Il donne maintenant 15 piastres par mois.—Ibid.

M. Touchette, maître maçon, de cette ville, a pris le contrats pour bâtir un nouveau phare sur la Pointe-des-Monts, à 5 louis la toise. La pierre doit être équarrie sur le lieu, et l’ouvrage complété l’automne prochain. Ibid.

Par une annonce des commissaires, qui sont MM. Andrew Moir, J. Saxton Campbell et J. Dyke, nous voyons que le chemin de l’Anse-des-Mères à Sillery, pour lequel la législature a voté 1,000 louis, va bientôt être commencé. Il doit passer le long d’une partie populeuse des faubourgs de cette ville et des ances, où se fait tout le commerce de l’embarquement, de léquarrissage et du triage des bois exportés de Québec. Ibid.

Nous apprenons que depuis la mi-juin, 30 familles d’émigrés d’une certaine respectabilité, et plusieurs possédant quelques fonds, venant du nord de l’Ecosse et d’Irlande, ont été s’établir dans Inverness et Leeds. Environ 20 familles de Montagnards de l’île d’Arran, formant 150 personnes, et arrivées à Montréal il y a quelque temps, ont, après un examen et des recherches soignés, choisi pour s’y fixer le township d’Inverness. Nous apprenons qu’on fait des arrangemens pour les recevoir, et on les attend tous de Montréal, avec leurs ustensiles d’agriculture, au commencement de la semaine prochaine, et ils partiront immédiatement pour se rendre au nouvel établissement, sur le lac Joseph dans le township ci-haut mentionné. On attend d’autres familles d’Arran pour aller les joindre; il doit aussi en venir d’Argyleshire, mais surtout des terres du duc de Hamilton, qui a pris le plus vif intérêt en faveur dès plus industrieux de ses tenanciers, qui étaient disposés à émigrer en Canada. Ibid.


Le 8 de ce mois, son Excellence, l’Administrateur du gouvernement, a déjeuné chez l’honorable L. J. Papineau, Orateur de la Chambre d’Assemblée. Ensuite son Excellence a visité l’Hôpital Général, et a témoigné sa satisfaction de l’ordre, de la régularité et de la propreté qui règnent dans l’institution. Son Excellence a aussi visité, le même jour, le Musée de la Société d’Histoire Naturelle. Son Excellence a paru voir avec plaisir les progrès qu’a faits cette Société depuis le peu de temps qu’elle existe, et lui a promis son appui et sa protection.


Omission. Dans le dernier numéro, à l’article Petite Chronique Canadienne, le nom de Joseph Masson, écr., a été omis par inadvertence, dans la liste des Directeurs de la Banque de Montréal, pour la présente année.


Accidens. Le 30 de Juin dernier, une petite fille âgée de 13 mois, enfant de Mr. J. B. Chalifoux, du fauxbourg Ste. Anne, s’amusant sur une galerie élevée, derrière la maison, sous les soins d’une servante, elle tomba malheureusement, dans un moment où la servante l’avait apparemment perdue de vue, et expira presque sur l’heure.

Un homme du nom d’O’Meara, abreuvant un cheval, au Courant de Ste. Marie, tomba dans la rivière, en conséquence de ce que l’animal s’y avança de manière à perdre fond. Il se débattit pendant quelque temps dans cette situation, en présence de plusieurs personnes, qui étaient incapables de le secourir, ou qui ne voulaient pas l’entreprendre au risque de leur vie. Enfin un chien touche en apparence de la situation de l’infortuné, qui appellait au secours d’un ton bien propre en effet à exciter la compassion, se jetta à l’eau pour tenter de le sauver. Malheureusement, O’Meara, hors de lui-même, saisit l’animal à la manière d’un homme qui se noie, et tous deux enfoncèrent pour ne plus ressoudre. L’homme devint la victime de sa crainte et de son égarement, et le chien de sa générosité désintéressée. Vindicator.


Montréal, 15 Juillet 1829.—Aujourd’hui a eu lieu la dédicace de la nouvelle Eglise paroissiale de cette ville. Il ne nous reste de place que pour dire que Monseigneur l’Evêque de Telmesse a assisté à la solennité comme célébrant, avec son clergé, ainsi que la plupart de Messieurs les Curés du district; que la cérémonie a été honorée de la présence de son Excellence l’Administrateur du gouvernement, accompagné d’un grand nombre d’officiers; des juges, des conseillers, &c. et que le concours des assistants des deux sexes a été prodigieux, et beaucoup plus considérable qu’il ne fut jamais à aucune cérémonie religieuse dans cette province.

COMMUNIQUÉ

Pour la Bibliothèque Canadienne.

St. Ours, 7 Juillet 1829.

Dimanche dernier, mourut ici Dlle Elisabeth, charmante petite fille du Dr. Dorion, âgée de quatre ans et demi, par suite du plus fatal accident.

Le Mardi précédent, sa robe prit en feu, à un des fourneaux de la cuisine; elle accourut, en criant, dans la chambre voisine, où elle fut secourue par le Docteur et par madame Dorion, qui malheureusement n’avait que l’usage d’un bras, tenant en ce moment un jeune enfant dans l’autre. Ils parvinrent avec peine et en se brûlant très fort les mains l’un et l’autre, à éteindre le feu, qui, suivant les apparences, n’avait pas brûlé d’angéreusement la charmante petite fille; ce qui fit alors espérer qu’elle en serait quitte pour quelques jours de souffrance; mais cet espoir fut vain; car le cinquième, elle tomba dans une stupeur alarmante, qui fut suivie d’une oppression, et finalement de la mort. La désolation de la famille se conçoit mieux qu’elle ne pourrait s’exprimer.

Ha! trop aimable enfant, tu jouis du bonheur,

Nous laissant les regrets, le chagrin, le malheur.

TRANSCRIBER NOTES

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Mis-spelled words and punctuation have been maintained except where obvious printer errors occur.

[The end of La Bibliothèque Canadienne, Tome IX, Numero 2, Juillet 1829. edited by Michel Bibaud]